Gabon/Un scrutin sans observateurs internationaux

A l’instant que le temps et la vie m’accordent de mettre sur écrit ces quelques lignes, la retransmission des médias FRANCE 24, TV5 MONDE, RFI et Internet a été rétablie sur l’ensemble du territoire. Une coupure d’informations momentanée qui davantage confirme l’absence des observateurs internationaux ainsi que des médias du même acabit. Saluons donc les droits de l’homme et la bonne gouvernance !
Cette situation chaotique, proche d’une aurore apocalyptique était en effet la résultante du climat qui présageait déjà, à quelques encablures du premier triple scrutin de l’histoire politique contemporaine du Gabon, un déroulement du vote sous haute tension.
Le 26 août 2023 à 20h, le scrutin sensé avoir débuté depuis 7h du matin et clos à 18h par une déclaration publique du Président du bureau tel que l’indique le chapitre III de l’organisation des opérations électorales en République Gabonaise, n’était pas totalement effectif. À 18h, on relevait des retards accrus sachant que le scrutin était organisé sur un seul jour et avec de nombreuses insuffisances qui laissaient présager des résultats peu crédibles, si ceux-ci venaient à donner le candidat du PDG vainqueur. En effet, le « candidat-président » Ali BONGO ONDIMBA a demeuré dans ce contexte, maitre du jeu et son gouvernement, flanqué de toutes les prérogatives comme en situation normale, semblait agir selon le mot d’ordre du Parti. Au Gabon comme un peu partout dans le monde, la machine du PDG était en marche et le scrupule venait à pâlir devant ses manigances. On notait clairement un scrutin sous les auspices de grandes irrégularités.
Avant la coupure d’internet, il a été spontanément relayé que dans de nombreux centres de vote, à l’Estuaire comme dans l’arrière pays, le bulletin du candidat Albert ONDO OSSA était manquant et qu’à la place, ceux de ses soutiens, qui s’étaient d’ailleurs retirés au profit d’une candidature unique, étaient présents dans les bureaux de vote. Ce qui ne semblait pas normal au regard de l’article 79 nouveau (Loi n 033/2023 du 15 juillet 2023) alinéa 2 à 7.
A cela s’ajoutait, les effectifs incomplets des représentants de la tenue du scrutin dans certains bureaux de vote (cas de la commune d’Owendo). Pourtant l’article 76 nouveau (Loi n 033/2023 du 15 juillet 2023) dispose que « la direction du scrutin est assurée par un bureau comprenant un président, deux vice-présidents et deux assesseurs. » Or, le cas échéant, le scrutin avait démarré avec une nette incomplétude des effectifs escomptés. Cet état de fait démontre à plus d’un titre que toutes les dispositions n’étaient pas réunies pour enregistrer un scrutin sans bavure.
La grande question est dès lors de savoir si cela fut volontaire ou le résultat du manque d’organisation compte tenu de cette première expérience (triple scrutin + bulletin unique). Au vu des faits aujourd’hui, la situation témoigne de ce que cela aurait été consentie au mépris du code électoral revisité.
Ali BONGO ONDIMBA avait-il encore vraiment besoin d’un pareil stratagème lorsque le bilan de ses 14 années de règne est aussi catastrophique, selon un récent rapport de la Société Civile, qu’il n’a même pas pu se présenter sur les émissions télévisées, créées pour la circonstance ?
A l’heure où les gabonais appelaient de tous leurs vœux à un changement réel et généralisé, il ne fait aucun doute que plusieurs ennemis de la nation avaient choisi le camp de la forfaiture, foulant au pied les paroles nobles de notre cher hymne nationale »La Concorde ». Ils étaient en effet là, les perfides trompeurs qui ont transformé notre si beau Gabon en un véritable champ de ruine, élevant au passage la culture des sous valeurs au rang de patrimoine national.
Bien que pendant la période du scrutin les informations via internet étaient difficiles d’accès, reste que le climat était quasi-explosif et nul ne savait très exactement ce qui serait advenu de ceux qui auraient eu le mérite, au nom du patriotisme, de s’opposer à la force des armes devant l’injustice dans toutes ses dimensions.
Alors que les plaies de 2016 sont encore vives et béantes, les dirigeants de notre pays ont esquissé, semble-t-il, de nous faire passer tous sur le fil du rasoir.
Nous en étions là, encore à avoir peur, à courir partout et dans tous les sens car il fallait dans cet environnement, se cacher et chercher à ne pas mourir de faim alors que tout, notamment pour la circonstance, à triplé de prix, plus que ce qui était déjà la triste réalité.
Quel mal aurait commis le peuple gabonais devant l’Eternel ? Quel sort nous aurait-il été réservé au soir de ces élections si le Comité de Transition pour la Restauration des Institutions (CTRI) ne serait pas intervenu ?
Notons toutefois qu’en organisant ce scrutin sans la présence des observateurs et médias internationaux, le Gabon s’est illustré, bien que tristement, à travers un principal élément : sa capacité de souveraineté à organiser un scrutin sans « implication » extérieure. Cependant, si l’on peut reconnaitre à cette initiative son mérite au regard des rapports de l’UE, OIF et UA jugés crisogènes par le régime en place, il convient de noter qu’à partir du coup d’Etat militaire du CTRI, l’absence de ses missions d’observation a davantage montré les limites d’une jeune démocratie telle que la nôtre, la présence des observateurs ayant un effet dissuasif. Les rapports des missions d’observation étant considérés comme de « simples avis », donc n’ayant aucune fonction coercitive, la présence des observateurs internationaux aurait- elle, malgré les constats évoqués par le CTRI, empêché le coup d’Etat ?
Retenons une seule chose pour l’heure : « Dieu ne nous a pas donné le droit de faire ce que nous sommes en train de faire », dixit feu Omar BONGO ONDIMBA.
